La notion de sens dans les apprentissages, retour réflexif sur l'essence de l'enseignement musical.
Aujourd'hui, on ne compte plus les offres d'apprentissages de la musique à notre disposition : les conservatoires, les écoles de musique, les centres sociaux, les cours privés ou associatifs, les orchestres, les outils numériques, les offres internet gratuites, semi-payantes ou payantes...jusqu'au morcellement de l'apprentissage porté par les écoles de musique lors du cours d'instrument, puis de FM, puis de l'ensemble instrumental ou vocal ou toute autre pratique collective. Il faut faire et faire-faire de la musique, rendre actifs les élèves musiciens et multiplier, diversifier les offres de pratiques musicales. L'on comprend bien qu'une telle démarche est portée par un souci d'exhaustivité dans les apprentissages, permettant l'accès à toutes les cultures, toutes les compétences, toutes les esthétiques... Pour autant, hélas, cette envie de "faire plus" ne s'accompagne pas forcément d'un "mieux faire". La dissolution de l'essence même de cet apprentissage peut, en effet, menacer gravement cette démarche de fractionnement exponentiel de l'apprentissage. Autrement dit, le pédagogue doit rester vigilant à ne pas faire l'économie du sens global des des enseignements de la musique, notion essentielle qui devrait prévaloir à toute démarche pédagogique.
- Le sens dans les apprentissages : une notion fondamentale ?
- Un champ essentiel dans cette construction du sens : l'idée de lien au sein des apprentissages ?
Notre recherche commune est partie du constat que, d'après nos expériences, la notion de lien entre les apprentissages apparaît assez souvent négligée, parfois même oubliée. Par définition, le lien est ce qui établit entre des choses abstraite un rapport, en particulier logique ou de dépendance. Il impose également une certaine contrainte permanente. Or lier intelligiblement les savoirs permet de favoriser le sens global des apprentissages au sein de l'expérience artistique pour tous les acteurs (enseignants, élèves, parents), en consolidant notamment le processus d’apprentissage (décrit par Philippe Meirieu en trois phases : identification, signification, utilisation[1]), et joue un rôle non négligeable dans le développement de la motivation.
[1] MEIRIEU Philippe, Apprendre, oui.. mais comment ?, ESF éditeur, Paris, 1987, p.55
1. Le sens favorisé par les liens entre les disciplines musicales ? (Anne Bernard)
2. Notion de lien à travers les nouvelles technologies (julien Delavelle)
Parler de "l'exigence rythmique" que l'on peut avoir envers les élèves sans que ceux-ci ne comprennent pas pourquoi : "Ouais c'est bon j'y arrive à peu près" effectivement l'élève y arrive "à peu près" mais ne comprends pas pourquoi son professeur voudrait qu'il y arrive exactement. L'élève ne comprends pas le sens, l'intérêt, de s'efforcer à réaliser parfaitement un rythme, de taper la pulsation de manière régulière, de s'aider d'un métronome... L'utilisation des outils numériques peuvent apporter du sens à cet enseignement musical.
Les loopers (boucleurs) peuvent se révéler un formidable outil de travail pour cet enseignement musical. Ce n'est pas la première idée que veulent faire passer leurs utilisateurs lorsqu'ils l'utilisent en concert, à la télévision ou sur Youtube mais, son utilisation comme outil pédagogique est "porteuse de sens". Les élèves sont fan de ces video Youtube où l'artiste monte de toute pièce un morceau uniquement avec sa voix ou alors avec d'autres instruments. Ils leurs vient une envie d'imiter, de faire eux-même un morceau en s'enregistrant."Ben oui, c'est pas compliqué, tu chantes, hop tu tapes sur le bouton, c'est enregistré, tu retapes pour réenregistrer et après, tu mets ca sur le net."Au vu des explications des élèves, l'utilisation à l'air d'une simplicité évidente. Son utilisation en est tout autre.
Pour faire court, le principe du boucleur repose sur des boucles que l'on enregistre et que l'on superpose. Il faut donc que les boucles soient au même tempo, et que le déclenchement d'une boucle se fasse quand l'autre se termine si l'on veut que l'effet de superposition soit réalisé. Si l'élève n'appuie pas sur la pédale à la fin du cycle de mesure, les boucles sont décalées. S'en suit un travail de ressenti de la pulsation et de synchronisation des membres pour appuyer au bon moment. C'est à ce moment-là que l'élève se rends compte que la pulsation régulière est importante. S'ajoute ensuite la superposition des rythmes des différentes boucles. Si dans une boucle il y a "Quatre doubles croche" et dans une autre "croche pointée double", le looper va rapidement faire ressortir l'imprécision rythmique. L'élève va lui-même entendre que les deux rythmes ne se superpose pas et va se rendre compte que "croche pointée double" doit s'exécuter avec une certaine précision.Ceci est une utilisation des nouvelles technologies dans l'enseignement musical sur un sujet. Le looper peut-etre utilisé pour d'autres exercices comme la justesse, l'harmonie..Ils'utilise aussi bien en cours de formation musicale qu'en cours de formation instrumentale.
Les nouvelles technologies sont en plein essort et d'autres applications sont possibles pour que l'élève comprenne pourquoi il apprend. La carte heuristique des nouvelles technologies dans l'enseignement musical est une vision globale des différents outils et leurs applications que le professeur d'enseignement musical peut intégrer dans ses cours.
3. Le sens donné aux apprentissages par le développement créatif ? (Alexandre Orlando)
4. Quel sens peuvent bien endosser les situations de pratiques collectives au sein de l’apprentissage musical ? (Stéphanie De Lucio)
A l’heure ou l’on entend parler tous azimuts de réduction de budget, de la nécessité de faire plus avec moins d’argent, les pratiques collectives apparaissent comme providentielles.Les bienfaits du faire de la musique ensemble, ou à plusieurs, pourrait-on dire (ce qui n’est toutefois, pas forcément la même chose) ne seraient plus à démontrer. Or en tant qu’enseignants nous avons l’absolu devoir de nous interroger sur le contenu des apprentissages des pratiques collectives musicales, voir de s’assurer qu’il y en ait. Comprendre ce qui est en jeu dans les pratiques collectives et définir l’importance qu’elles peuvent avoir pour donner plus de sens aux apprentissages, est la seule manière de les rendre légitimes et efficientes au sein des écoles de musique. Dans l’enseignement général, dans l’éducation nationale, l’apprentissage en groupe constitue la norme, il semble aller de soi. Néanmoins pédagogues, psychologues, chercheurs en sciences de l’éducation se sont interrogés dès le début du 20ème siècle sur l’essence même de cet enseignement à plusieurs, et de ses implications pédagogiques. Ceux que l’on a pris l’habitude de rassembler sous les dénominations de courant de l’école nouvelle ou encore des pédagogies actives, même s’ils étaient portés par des considérations singulières (cf Tableau pédagogues) ont eu des axes communs de questionnement :
- - L’activité de l’élève dans la construction de son apprentissage
- - La place du réel et la fonctionnalité liées aux apprentissages
- - L’école comme entité social
furent des préoccupations qui interrogeaient directement le fonctionnement de la classe traditionnelle. Les recherches en mécanismes de l'apprentissage, qui, d’une part mettaient en évidence le renforcement que constituait l’activité de l’élève dans l’élaboration de son savoir, le constructivisme, mais aussi l’importance des interactions entre les individus dans la construction de celui-ci, le socio constructivisme, venaient renforcer, accompagner cette volonté d’interroger les dispositifs pédagogiques traditionnels.
Dans cette triple approche, la classe traditionnelle est considérée comme fictive : elle ne fonctionne pas comme un groupe, ni dans ses apprentissages, ni dans ses interactions et ne se confronte pas au réel. La question du lien est posée : lien entre les individus, les apprenants ; lien avec le réel, aussi bien dans la chose étudiée, que dans le dispositif artificiel mis en place, mais aussi la relation, le lien, à l’enseignant et son rôle sont interrogés.
L’enjeu devient alors de faire agir un groupe d’individu dans le processus même de l’apprentissage, d’en observer le fonctionnement, d’optimiser ses points forts et d’éviter ses dérives. Désormais des propositions de dispositifs d’apprentissage en groupe, permettant de gérer l’ensemble de ces paramètres, peuvent émerger.
Philippe Meirieu prend en compte les différentes études et théorisations des pédagogies de groupe qui l’ont précédé (Cousinet, Freinet…) et conceptualise le Groupe d’apprentissage.
Récit d'expérience :
Comment donc revisiter les dispositifs pédagogiques des situations musicales collectives, aux vues de ces constats, études et propositions ? Professeur de chant lyrique au CRC d’Evian les Bains je souhaitais que les chanteurs soient davantage impliqués dans leurs apprentissages et dans leur pratique musicale. Il me semblait important qu’ils soient en situation d’une pratique amateur de référence et notamment en contact avec divers musiciens. Je me suis donc servi des propositions de Philippe Meirieu pour créer un « atelier-mêlé » réunissant chanteur et pianiste sous la forme d’un groupe d’apprentissage.
Ma posture d’enseignante était à repenser. Dans l’élaboration des ateliers j’ai dû définir les objectifs d’apprentissages visés pour chaque participant, imaginer une tâche, édicter des consignes et fournir les ressources nécessaires à l’exécution de celle-ci. Lors des ateliers, mon rôle est celui de régulateur, devant s’assurer que l’ensemble du dispositif est compris et respecté, aussi bien dans l’exécution de la tâche que dans l’échange entre les apprenants : s’assurer de l’émergence d’un conflit socio-cognitif lors d’échanges équilibrés.
- Bibliographie générale
Voici ici notre bibliographie.
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